Rhama Elée Ferré

Critique de « Rhama » d’Elée Ferré

Encre noire sur papier récupéré – 50 x 75 cm
Collection Grands Espaces

Avec « Rhama », Elée Ferré poursuit son exploration des tracés, cette fois dans une composition qui oscille entre expansion et retenue. Ici, le geste ne cherche pas à saturer l’espace, mais au contraire, à dialoguer avec le vide, à s’en approcher, s’y ancrer. L’œuvre semble incarner une force en train de se déployer, comme une respiration qui hésite entre repli et affirmation.

Le titre, « Rhama », évoque un nom propre, une identité, une présence qui se construit sous nos yeux. Les lignes, appliquées à la plume, témoignent d’une sensibilité exacerbée, d’une tension entre l’organique et l’évanescent. Elles s’étirent, se nouent, s’effilochent à la périphérie de la forme, comme si elles cherchaient à s’ancrer sur le bord de la feuille pour mieux exister. Mais quelle est cette entité ? Est-ce une silhouette en train de naître, un souffle en train de s’inscrire dans l’espace, une pensée qui cherche son point d’attache ?

Dans cette œuvre, Ferré joue avec le minimalisme et la suggestion. Le vide occupe une place prépondérante, soulignant d’autant plus la densité du tracé. Ce contraste confère une charge émotionnelle forte à l’image : Rhama semble suspendue dans un état de réflexion, entre apparition et dissolution. Cette approche rappelle le travail d’Osvaldo Cavandoli, où la ligne seule suffisait à exprimer une idée, un mouvement, une intention. Ici, cependant, la ligne se complexifie, se plisse et se tend, donnant naissance à un relief, une texture presque tactile.

L’utilisation du papier récupéré renforce cette quête de simplicité et de sincérité. En choisissant un support modeste, Ferré concentre toute l’attention sur l’essentiel : l’acte de tracer, de révéler, de questionner. Le papier devient un territoire où la pensée prend corps, où la ligne devient langage.