Rencontre-s – Elée Ferré

Critique de « Rencontre-s » d’Elée Ferré

Encre violette de récup’ sur papier récupéré – 50 x 75 cm
Collection Grands Espaces

Avec « Rencontre-s », Elée Ferré explore la dynamique des échanges, la place de chacun dans un espace partagé et les flux invisibles qui tissent nos relations. Ici, le tracé, appliqué à la plume et encre violette,  semble incarner une cartographie des liens, un réseau de tensions et de courbes qui se croisent, s’évitent, s’emmêlent ou s’harmonisent.

Le choix du pluriel dans le titre – « Rencontre-s » – souligne la multitude d’interprétations possibles. Il ne s’agit pas d’un échange unique, mais d’une série d’interactions en mouvement, de trajectoires qui se superposent et se réécrivent. Chaque ligne pourrait représenter un individu, une idée, une pensée qui évolue et se transforme au contact des autres.

Dans cette œuvre, le vide est aussi important que le tracé. Certains espaces sont denses, saturés de lignes entremêlées, là où d’autres zones respirent, laissent place à une attente, une latence. C’est ici que réside l’une des forces du travail de Ferré : une composition qui ne se contente pas de figer des formes, mais qui suggère des forces en présence, des tensions et des silences.

L’encre violette, moins courante que le noir, utilisé dans son œuvre, apporte une nouvelle dimension. Elle évoque le passage, la transition, une teinte qui oscille entre ombre et lumière. La récupération de l’encre et du papier s’inscrit dans la démarche globale de l’artiste : celle d’un art réfléchi, ancré dans une économie du geste et du support, où chaque élément a son histoire et son poids dans la composition finale.

Mais quelles sont ces rencontres ? La question posée par l’artiste reste ouverte. Sommes-nous face à un dialogue apaisé ou à une friction entre forces opposées ? Quels flux régissent ces échanges, un sens défini, un débit irrégulier, une pérennité fragile ou assurée ?

En jouant sur cette tension entre connexion et isolement, Ferré nous invite à une lecture active, où le regard circule entre les lignes, tente d’en suivre le parcours, d’en déduire une narration qui lui est propre. Comme souvent dans son travail, l’artiste nous propose une immersion où chacun trouve sa place et sa propre interprétation.