Critique du tableau Alter ego par Françoise Dugourd-Caput

Un souffle lyrique dans la tempête

Dans Alter ego, Françoise Dugourd-Caput nous entraîne dans un mouvement furieux et poétique, où l’abstraction lyrique trouve toute sa puissance expressive. Les formes vaporeuses et les matières tendues évoquent la voile d’un navire luttant contre les éléments, en pleine tempête intérieure autant qu’extérieure. Ce n’est pas un simple paysage marin : c’est une traversée émotionnelle, un combat silencieux contre l’instabilité et le chaos.

Matières en tension, matières en fusion

Le travail du collage — tulle et papier de soie — s’inscrit ici comme une strate supplémentaire du drame pictural. Le tulle, parfois tendu, parfois froissé, mime la peau de la mer ou le frisson du vent. Sous les gestes vigoureux de l’artiste, le couteau, le pinceau et même les doigts sculptent la toile, donnant aux matières une vitalité organique. Le mélange d’acrylique et d’huile renforce cet effet de fusion et de superposition, créant une surface tantôt lisse, tantôt déchirée, où la lumière semble s’accrocher désespérément.

Une palette dramatique et incandescente

La palette chromatique de Alter ego est dominée par les noirs profonds, les bleus d’orage et les ocres brûlés, ponctués de fulgurances rouges et turquoise. Chaque couleur est chargée d’une énergie propre, parfois heurtée, parfois fluide, à l’image des contrastes émotionnels qui traversent l’œuvre. Ces teintes vives et éclatées semblent jaillir de la matière sombre comme des cris dans l’obscurité, portant toute la tension du tableau.

Un combat intérieur mis en scène

Au-delà de l’apparente abstraction, Alter ego parle d’un dialogue profond avec soi-même. L’œuvre donne corps à une dualité intérieure : entre résistance et abandon, entre maîtrise du geste et lâcher-prise émotionnel. Le titre prend alors tout son sens : cet « alter ego » est peut-être cette part de nous-mêmes que nous tentons de maîtriser ou de rejoindre dans l’adversité.